mercredi 17 août 2011

De la dette publique à l’investissement dans notre avenir

La crise des dettes souveraines, qui aura défrayé la chronique cet été, a fait apparaître dans le débat public un nouveau concept : les euro-obligations ou eurobonds en anglais. Pour faire simple, il s’agirait en mutualisant les dettes des Etats membres de la zone euro, d’assurer aux pays un taux unique d'emprunt sur les marchés.  Les euro-obligations sont aujourd'hui à l'état de projet car les Allemands s’opposent farouchement à cette mesure. Ils ne voudraient pas voir leur crédibilité de créancier se diluer dans une dette européenne entachée, selon eux, par les mauvais gestionnaires que sont les pays d'Europe du Sud. Angela Merkel a d'ailleurs mis assez de pression sur Sarkozy pour que cette question ne soit même pas discutée lors du sommet franco-allemand du 16 août à l’Elysée.

© Reuters
Le paysage étant posé, je voudrais m'attarder sur un point qui m’irrite quelque peu les oreilles quand j’entends parler des euro-obligations. Tous les observateurs, qu’ils soient économistes, journalistes ou même politiques ne jugent la question des euro-bonds qu'au travers du prisme de la crise de la dette souveraine. Dans les quelques discours qui se font sur le sujet, on entend que mutualiser les dettes européennes servirait à protéger les pays des attaques spéculatives sur… leur dette. En somme, faisons de la dette pour nous protéger de la dette.

Mon idée n'est pas ici de prolonger le soupçon que nourrissent nos cousins germains envers ces pays prétendus laxistes du sud et qu'ils accusent de vouloir endetter l’Europe pour de bon. Mon intention est plutôt de remettre en cause les discours qui perdent de vue à mon sens ce à quoi doit servir une dette souveraine.

Le projet des euro-obligations, s’il ne sert qu’à garantir la dette des Etats est inutile. Bien plus qu’un nouveau moyen de financer le fonctionnement des Etats, ces eurobonds doivent constituer un levier essentiel d’investissement dans notre avenir. Selon mes calculs, la zone euro pourrait lever pas moins de 70 Milliards d’€ s’il elle s’endettait à hauteur de 3% de son PIB, c’est-à-dire largement dans les clous des critères de convergence de Maastricht. Quant à l’Union Européenne, ce n’est  pas moins de 445 Milliards d’€ qui pourrait être mobilisés dans les mêmes limites jugées raisonnables par nos voisins tudesques.

Ces chiffres sont bien évidemment virtuels, étant donné l’absence de budget de l’Euro-Zone ou l’impossibilité qui frappe l’Union européenne de créer de la dette en son nom. Quoi qu’il en soit, ces montants donnent une idée très claire de ce qui pourrait être investi par l’Europe dans l’éducation, la R&D ou encore dans les politiques industrielles si cette dernière était une entité politique, sociale et économique digne de ce nom.

L'Europe, si elle veut éviter des années voire des décennies de croissance atone, a besoin d'un nouveau Plan Marshall. Là est le vrai enjeu d'une gouvernance économique nouvelle pour le vieux continent. De l'idée d'une surveillance mutuelle des déficits publics des uns et des autres, il faut passer au stage des investissements massifs dans le nouveau modèle de développement, prôné par beaucoup mais mis en oeuvre par personne. Un modèle plus sobre en énergie et en matières premières mais à nouveau créateur de richesses, d'emplois et pourquoi pas de bonheur (soyons fous!).

Si l'Europe rate cette opportunité, d'autres s'en saisiront et s'en saisissent même déjà. Pas plus tard qu'en juin dernier, c'est-à-dire au moment où la Grèce était au plus fort de la crise de la dette, deux groupes industriels chinois ont signé avec les autorités helléniques un accord de près de 3 Milliards d'€ sur le développement des énergies solaires dans le pays. Y'a comme qui dirait quelque chose qui ne tourne pas rond sur notre vieux continent.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire