dimanche 23 janvier 2011

La fabrique à Marine Le Pen

© KEYSTONE
On pense généralement que c’est l’actualité qui dicte le contenu des journaux. Or c’est exactement le contraire : c’est le contenu des journaux qui dicte l’actualité. Depuis deux ans, les journalistes ont fabriqué Marine Le Pen. Aujourd’hui, ils travaillent à lui ouvrir, bien malgré eux, les portes du second tour de la présidentielle 2012.

Bruno Gollnisch aurait sans doute eu ses chances pour briguer la tête du FN. Hélas pour lui, les médias ont focalisé leur attention sur la fille du chef. La campagne municipale d’Hénin-Beaumont en est le meilleur exemple : combien de villes de 25 000 habitants ont eu droit à une couverture de leurs élections municipales par les journaux télévisés de TF1 et France 2 ? Pas beaucoup, en effet.

Ces dernières semaines, la désignation du nouveau président du Front National a fait l’objet d’une couverture médiatique massive. Trois unes de Libé depuis le 15 janvier dernier. Marine en plateau du 20 heures de David P, invitée de Jean-Jacques B. sur RMC et BFM TV… J’en passe et des meilleures, car l’objet n’est pas ici de faire l’inventaire de ses apparitions médiatiques. Constatons simplement que le FN, que les mêmes journalistes disaient moribonds il y a à peine trois ans et demi, est aujourd’hui l’objet de toutes leurs attentions.

Les médias jouent un rôle important de leaders d’opinions. En décrivant la mutation de Marine Le Pen, en s’attardant sur la manière dont elle travaille à la dédiabolisation du FN, ils ne font que la rendre plus politiquement correcte, plus acceptable dans le paysage politique. A ce rythme-là et si nous suivons bien ce raisonnement, il n’y aura bientôt plus de honte à voter FN. 

Au lendemain du premier tour, ils diront qu’ils parlaient d’elle comme du danger qui monte. La réalité est qu’ils parlent d’elle parce qu’elle fait vendre. La presse n’est pas une œuvre caritative, c’est une activité commerciale. On devrait toujours s’en souvenir quand on ouvre un quotidien, quand on allume la télé ou qu'on branche la radio. Si Marine Le Pen remonte dans les sondages, ce ne sera qu’un regrettable dommage collatéral et mécanique de l’activité commerciale d’information.

Dédicace à celui grâce à qui cet article a vu le jour. Un chic type avec lequel j'ai participé à la rédaction du bouquin "10 raisons d'aimer (ou pas) l'éducation populaire". 

jeudi 20 janvier 2011

Quel rapport entre Oxmo Puccino, Cyrano de Bergerac et Florent Malouda?

Vous ne me verrez pas souvent prendre une partie de ma pause de midi pour faire la promotion du grand capital sur ce blog. Pour autant, l'amateur de football, de belles lettres et de musique que je suis n'a pas pu résister à l'envie de saluer le travail de ceux qui ont bossé avec la firme Nike sur l'officialisation de son nouveau statut d'équimentier officiel des bleus. Au delà du nouveau maillot (avec lequel l'équipe de France sera fin prête pour la coupe du monde 1930 en Urugway), c'est bien plus sur la campagne de publicité que mon attention s'est portée. Le parti pris de Nike est audacieux: réunir dans un format de 47 secondes un taulier du patrimoine littéraire français, un rappeur bien connu et une partie de nos valeureux grévistes de Knysna évoluant entre le tiéquar et le Grand Stade. Le pari est réussi.
A noter également dans cette pub que pour la première fois on a enfin osé mettre une femme sur le terrain. Un pas franchi qui mérite d'être souligné, même si notre footballeuse est furtivement représentée pour taper une magnifique barre. Qui sait, Nike la laissera peut-être marquer un but dans un prochain opus?
Une musique de Karl Jenkins (intitulée Palladio), un texte d'Edmond Rostand faisant croiser le fer à Cyrano de Bergerac, le tout lu par Oxmo Puccino. Je vous laisse apprécier le résultat.


En prime: le Teaser qui a précédé cette campagne de pub. En garde!

samedi 8 janvier 2011

Ce jour-là, nous étions la Génération Mitterrand

C'était le lundi 8 janvier 1996, et il devait être à peu près 13h45. Comme chaque jour, mes petits camarades de classe qui avaient passé le repas de midi chez eux revenaient au collège pour une après-midi de folies scolaires. Mais à la différence des autres jours, leur retour provoquait un bruissement inédit dans la cour et sous le préau. Ils étaient en effet porteurs d'une nouvelle que chacun s'empressait de partager et faire circuler. Je ne sais plus exactement qui m'a appris la mort de Mitterrand. Ce dont je me souviens, c'est que nous étions tous empressés d'en parler et donc touchés par cette nouvelle. 

Un repère de notre petit bout de vie venait de disparaitre. Nous sommes tous nés en 1982, c'est à dire après son élection, et il avait quitté le pouvoir même pas un an plus tôt. Nous n'avions vu que lui à la télévision. Que ce soit lors des vœux, des défilés du 14 juillet, des commémorations, des interviews ou du bicentenaire de la révolution, François Mitterrand avait constitué l'horizon indépassable de notre paysage politique d'adolescents pré-pubères. Tonton avait été LE président et nous réalisions ce jour-là que nous étions la "Génération Mitterand". Ce sentiment nous traversait quelque soit ce que nos parents avaient pu nous dire, de bien ou de mal, sur cet homme à l'allure de vieux sage. 

Cet après-midi de cours a dû passer comme une autre, je n'en garde pas de souvenir particulier. Après avoir passé une ou deux heures à l'étude, je suis rentré chez moi. Dans la soirée, j'étais posté devant le téléviseur familial quand débuta le générique du 19/20 de France 3. La marque "édition spéciale" annonçait la couleur d'une émission réservée à la mort de Mitterrand. Le générique laissa la place à une musique et un diaporama de photos en noir et blanc que je n'ai pas oublié et que j'ai redécouvert au hasard de Dailymotion. Il est là, conservé dans une archive télévisuelle quelque peu endommagée: mon souvenir le plus marquant de la mort de Mitterrand. J'avais 13 ans.